TAUX DE TAXE SCOLAIRE UNIQUE : UN CADEAU EMPOISONNÉ?
Le projet de loi 3 déposé par le
ministre des Finances, Éric Girard, propose un taux unique de taxe scolaire pour
toutes les commissions scolaires du Québec.
À terme, ce changement porterait le
taux unique de la taxe scolaire au plus bas taux actuellement en vigueur (Commission
scolaire des Laurentides), soit 0,13 $ par 100 $ de valeur foncière
pour l’ensemble des propriétaires au Québec.
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Source: dépliant taxe scolaire de la CS de Laval |
Historique
En mars 2018, le gouvernement
majoritaire du Parti libéral avait fait modifier la loi sur la taxe scolaire,
une première réforme en 25 ans, pour implanter le concept de taxe unique régionale.
Fortement contesté par les
groupes d’oppositions, le projet avait tout de même été adopté à l'Assemblée
nationale, 61 voix pour et 40 voix contre.
L’idée était d’assurer une équité
de taxation dans chacune des régions. Par exemple, deux voisins résidants de ville
de Laval pouvaient avoir des taux différents, selon s’ils payaient à la
Commission scolaire de Laval (francophone) ou à la Commission scolaire Sir
Wilfrid-Laurier (anglophone).
Même région, mais des taux différents.
Toujours à Laval, un écart de 12 points en 2017. Chez les francophones, le taux
était fixé à 0,23095, tandis que les anglophones, le taux était de 0,35000 $
du 100 $ d’évaluation foncière.
Suite à ce changement à la loi, lors
de l’exercice d’impositions 2018-2019, le taux uniformisé pour la région a
été établi à 0,23095 $ du 100 $ d’évaluation foncière supérieure à 25 000 $.
En plus, une nouvelle exemption, du premier 25 000 $, a aussi été introduite
lors du changement à la loi.
Dans la brochure qui accompagnait
le compte de taxe de la CSDL, ont pouvait lire, concernant cette deuxième
modification : « Ceci représente une réduction du compte de taxe de 57 $
pour chaque propriété ayant une évaluation supérieure à 25 000 $. Cette
exemption totalisant 7,3 millions de dollars est subventionnée par le
gouvernement du Québec. »
Au global, les contribuables québécois ont vu la facture diminuée de 670 millions de dollars, puisque le gouvernement, a compensé entièrement le manque à gagner à partir des surplus budgétaires accumulés avait annoncé le ministre de l’Éducation de l’époque Sébastien Proulx.
La Coalition avenir Québec (CAQ), maintenant le groupe au pouvoir, dénonçait cette réforme, qui maintenait les iniquités entre les concitoyens selon la région qu’ils habitent. « Par exemple, les résidants de la Mauricie (0,30 $ le 100 $ d’évaluation) paieront plus cher en taxe scolaire que ceux des Laurentides (0,13 $ le 100 $ d’évaluation)» avaient décriée François Legault. Cet écart de 0,17 $ le 100 $ d’évaluation représente, pour deux résidences de 300 000 $, des comptes respectifs de 900 $ et 390 $.
Une deuxième réduction du fardeau fiscal
La nouvelle mouture de la loi, si
adoptée, créerait un trou dans les coffres de l’État, évalué par la CAQ en
campagne électorale à 700 millions $, mais maintenant au pouvoir le manque à
gagner est revu à la hausse par le ministre Girard à 900 millions $. Une somme
non négligeable.
Puisque, à nouveau cette baisse du fardeau fiscal, pour les contribuables, sera financée à partir du surplus accumulé, qu’est-ce qui se passera quand celui-ci aura fondu comme neige au soleil? Le réseau se verra servir une nouvelle compression? Le premier ministre Legault a promis de ne plus servir de compression en éducation, peu importe les aléas de l’économie du Québec.
Questions sans réponses
Si le projet de loi était adopté,
au total, manque à gagner de 1,5 milliard par année dans les coffres de l’État.
Le gouvernement n’aurait-il pas pu, à la place de concéder des réductions,
accélérer les investissements pour aider à rattraper les coupures des 10
dernières années? Du sous-investissement en infrastructure? Pour introduire le
dépistage plus tôt, que ce soit par la maternelle 4 ans ou autres mécanismes?
À titre de payeur de taxe, je suis très content de voir ma facture diminuée, mais en matière de taxation, est-ce équitable d’avoir une taxe unique régionale (ou « égale ») pour tous? Pareille, pour la petite maison rurale au château de Westmount.
Il ne faudrait pas oublier, dans cette recherche d’égalité, que ce sont les propriétaires qui toucheront ce « cadeau » et qu’il n’y a aucune garantie que les locataires, qui représentent 40% de Québécois, bénéficieront de cette réduction.
Je n’ai toujours jamais trouvé
réponse à mon questionnement de fond. Comment expliquer que la Commission
scolaire des Laurentides arrivait – malgré sa petite taille – à faire avec un
taux de 0,10 $ — tandis qu’en Outaouais, la Capitale nationale, avec une
clientèle beaucoup plus grande, ont avait besoin de 0,30 $ la tranche de 100 $
d’évaluation foncière pour financer les services administratifs?
N’aurait-il pas été prudent de répondre à ces questionnements avant de plancher sur ce projet de loi?
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source: facebook |
Pour arriver au taux de taxe
unique, il faudra 4 ans. C’est donc dire que la taxe scolaire ne sera pas abolie
dans le premier mandat. Par déduction, il faut comprendre que la promesse d’abolir
les conseils des commissaires ne pourra pas plus être aboli, car rappelons-le, « no
taxation without representation ».
Pour avoir des réponses aux
nombreuses questions qui demeurent sans réponses, il faudra attendre le
cheminement du projet de loi à travers les différentes étapes législatives. À suivre.
M.P. R
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